En tant que lectrice, j’aime quand l’auteur décrit ses personnages. Dans son esprit, il doit bien avoir des résidus du héros qu’il a créé et j’aimerais y avoir accès.
Une fois, je lisais un roman de science-fiction et pendant la moitié du texte, j’avais imaginé l’héroïne d’une certaine façon puisque l’auteur ne donnait aucune description de ses personnages. Au milieu du roman (à environ 300 pages), on a enfin un indice : l’héroïne en question était poilue. Pas du genre poilue-parce-qu’elle-ne-s’est-pas-rasée comme Fiha avant qu’elle ne devienne la treizième concubine et ne subisse le supplice du caramel, mais du genre humanoïde-avec-fourrure. Le choc a été si grand que je suis totalement sortie de ma lecture (et je n’ai pas été la seule). Tout ce que j’avais imaginé pendant 300 pages s’avérait faux et pour reprendre la lecture, il me fallait recalibrer mon imagination. À ce stade, c’est un peu comme sortir le gâteau qui cuit dans le four depuis vingt minutes pour y ajouter de la farine, voyez ?
Sans descriptions, le lecteur impose sa propre vision du monde à l’auteur du roman. Il imagine un monde et si au trois quarts, l’auteur décide de donner enfin un indice, c’est trop tard. La fondation devient branlante. Ce moment où on se dit « tiens, cette fille doit être une grande blonde et distinguée » et soudain on lit « elle coupa ses cheveux bruns ». Hein ? À partir de quel moment l’auteur a-t-il décidé que le personnage en question serait brun ? Pourquoi ne l’a-t-il pas spécifié auparavant ? Quitte à ne rien décrire, que ce soit ainsi jusqu’à la fin du roman, ça éviterait les mauvaises surprises.
L’idéal serait (notez le temps employé) d’éparpiller les infos concernant le personnage pour éviter des blocs indigestes dès le départ. Si tel ou tel détail n’est d’aucune utilité dans ce passage-là, pourquoi se forcer ? On n’a pas besoin de parler de taille-poids-mensuration alors que le personnage vient d’entrer en scène, à moins que sa plastique de rêve ne fasse siffler les gens qui l’entourent (et là, on saura que non seulement que le perso est sexy, mais qu’il/elle évolue dans une zone qui craint).
On n’a pas besoin de faire de longues listes cliniques pour décrire quelqu’un. « Il avait les yeux verts », c’est un peu bof ; « la couleur de sa chemise rehaussait l’éclat de ses yeux verts » c’est un peu mieux. On n’a pas besoin de dire « il avait les cheveux roux », on pourrait parler de « les rayons de soleil faisaient ses cheveux flamboyer » (c’est un cliché, mais nous avons tous nos travers).
Est-ce important de parler de la race d’un personnage ? Pour moi (encore une fois, je rappelle que ce sont des avis personnels et que je connais des gens pour qui c’est un grand NON), ça fait partie de la description. On peut dire qu’un personnage a les cheveux roux, mais on ne peut pas dire qu’il est noir (pitié, pas « black » ou « de couleur », ça ne passe pas toujours très bien auprès des concernés) ? Ce serait ridicule. Ce n’est pas parce qu’un personnage est mongol ou amérindien qu’on ne va pas se l’approprier. Sinon, les femmes ne liraient jamais que des histoires de femmes, les hommes que les histoires d’hommes, et personne ne pourrait jamais écrire sur les extra-terrestres et les mutants. Là encore, tout dépend de comment le lecteur perçoit la chose (je vous conseille fortement l’article de Syven). Et non, on ne peut pas se contenter d’un nom. J’ai bien un nom allemand, mais je suis loin d’être blonde aux yeux bleus (et je n’aime pas la bière).
Le lecteur met ses clichés et ses propres préjugés dans ses lectures, alors si l’auteur ne s’est pas donné la peine de donner quelques indices en cours de route, il ne peut pas se plaindre que son héroïne blonde soit devenue une amazone brune dans l’imaginaire de ses lecteurs. Et s’il a la chance d’être adapté au cinéma et que les acteurs choisis n’ont pas du tout la tête qui se faisaient les lecteurs, alors…
C’est qu’il y a des polémiques qui partent de rien, ces jours-ci…



Salut à tous !
Dans la série, « un an d’[EC] », je tenais à répondre en toute sincérité à ces questions parfois étranges que vous vous posez et qui vous amènent sur notre site. (Top des recherches les plus bizarres qui aboutissent sur espacescomprises.com…)