Bibliothécaire = passeur de livres et de savoirs

Aujourd’hui, j’avais envie de vous parler du métier situé tout au bout de la chaîne du livre, celui de bibliothécaire. Cela fait une dizaine d’années que je travaille en bibliothèque, et je me suis rendu compte que les gens ont souvent une vision stéréotypée de cette profession. Je souhaitais donc vous présenter la mienne, même si celle-ci est aussi sûrement influencée par ma propre expérience.

Lorsque que j’ai commencé ma carrière, j’ai appris sur le tas, car je n’avais pas de formation spécifique. Mais au fur et à mesure, j’ai compris qu’aimer les livres n’était pas suffisant pour évoluer dans ce secteur. J’ai donc décidé d’acquérir des connaissances en bibliothéconomie, c’est-à-dire les techniques et savoir-faire spécifiques à la gestion d’une bibliothèque, un domaine particulièrement vaste. Par exemple, j’ai appris comment réparer les livres papier abîmés ou encore comment paramétrer un catalogue informatisé.
Il y a différents types d’établissement où le métier de bibliothécaire peut s’exercer : dans les bibliothèques de quartier, les bibliothèques d’école, les bibliothèques universitaires, les bibliothèques spécialisées, les bibliothèques d’entreprise, les bibliothèques d’association, etc. Les tâches confiées aux bibliothécaires varient donc selon les endroits, mais leur rôle demeure à peu près identique partout, il consiste à rendre accessible au public des ressources correspondant à ses attentes.

Voici quelques-unes des activités des bibliothécaires :

La sélection de ressources

Les bibliothécaires sélectionnent des livres (papier, numériques ou audio), journaux (papier ou numériques), CDs, DVDs, logiciels, bases de données, etc. Pour ce faire, ils doivent être curieux et se tenir au courant de la vie culturelle et des nouveautés éditoriales. Au moment de choisir ce qui sera intégré au fonds de la bibliothèque, ils doivent faire preuve d’esprit critique et se poser deux questions : Ce document sera-t-il consulté par les lecteurs ? Ce document est-il de qualité ?

Le référencement des ressources

Avant d’être mis à disposition des usagers, les documents sont enregistrés dans un catalogue informatisé. Comment procèdent les bibliothécaires pour l’alimenter ? S’il s’agit d’un livre, ils indiquent notamment le titre, le nom de l’auteur (ou des auteurs), l’éditeur, l’année de publication, ou encore le nombre de pages. Si c’est un enregistrement sonore, ils spécifient le titre, le compositeur, le nom de l’interprète (ou des interprètes), l’éditeur, l’année de publication ou encore le support d’enregistrement.
Souvent, ils décrivent aussi le contenu intellectuel. Par exemple, pour Les Trois Mousquetaires d’Alexandre Dumas, ils peuvent ajouter « roman de cape et d’épée » ou encore « Louis XIII » comme mots-matière. C’est grâce à ces méthodes de référencement que les lecteurs trouvent facilement ce qui les intéresse.

L’accueil et le renseignement bibliographique

Les bibliothécaires doivent être capables d’écouter les demandes des usagers et de les orienter vers les ressources adéquates. Ils peuvent ainsi les conseiller sur le choix d’un roman ou d’un ouvrage de référence avec une thématique particulière.
En tant qu’auteur, lorsqu’on écrit un livre, on a parfois besoin de se documenter sur tel ou tel sujet. Bien sûr, on peut tout simplement aller sur Internet et utiliser un moteur de recherche lambda, mais si on décide de fréquenter une bibliothèque, et pourquoi pas demander de l’aide à un bibliothécaire, il y a de grandes chances qu’on réunisse des informations plus rapidement et que celles-ci soient plus pertinentes, voire plus fiables.

La médiation culturelle

Bien qu’ils le fassent par des moyens variés, les bibliothécaires contribuent généralement à améliorer l’accès à la culture. Grâce à des services comme le portage à domicile, ils apportent directement des ouvrages aux personnes qui ne peuvent pas se déplacer. Les bibliobus permettent aussi d’atteindre plus de lecteurs.
Pour attirer les usagers, les bibliothécaires peuvent organiser des manifestations diverses : des expositions, des « Heures du conte », des débats, des rencontres avec des auteurs, des clubs de lecture, des concours d’écriture, etc. Il arrive qu’ils soient également community managers, car développer la communauté d’une bibliothèque sur les réseaux sociaux permet d’améliorer sa visibilité.

La médiation numérique

Avec l’arrivée des nouvelles technologies, le métier a évolué, et les bibliothécaires sont souvent devenus formateurs. De plus en plus, ils organisent des ateliers où les usagers peuvent apprendre à effectuer des recherches efficaces sur Internet ou encore à utiliser des tablettes.
Le 14 septembre 2013, la Bexar County BiblioTech library, la première bibliothèque sans collections imprimées, a ouvert dans le comté de San Antonio au Texas. Cet établissement ne possède bien entendu pas d’étagères couvertes de livres papier, mais à son ouverture, plus de 10 000 titres numériques étaient déjà disponibles, de même que des ordinateurs ou encore des liseuses. L’équipe de bibliothécaires y a pour mission de permettre l’accès aux nouvelles technologies, de former à leur utilisation, et de promouvoir la lecture, la culture et les loisirs.

À l’heure actuelle, le métier de bibliothécaire est en pleine mutation. Et pour ne pas se laisser dépasser, les professionnels doivent suivre les évolutions et remettre constamment leurs pratiques en question afin de s’assurer qu’elles correspondent bien aux attentes des usagers. Comme on a prédit la mort des livres, on a aussi prédit la disparition de ce métier, mais à mon avis, les bibliothécaires ont encore quelques beaux jours devant eux, surtout s’ils sont prêts à se renouveler.

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Le contrat d’édition – partie 1

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Le contrat d’édition, s’il est largement convoité, est aussi la source de bien des questions. Après tout, la plupart d’entre vous n’en ont jamais signé et les différents points qu’il recouvre ne sont pas toujours très clairs. Difficile de s’y retrouver dans le jargon technique et juridique quand on n’a pas la moindre explication. Voici une série d’articles pour mieux comprendre cette formalité mystérieuse…

1/ Les droits d’auteur

C’est ce à quoi on pense immédiatement quand on parle de contrat d’édition, pourtant ce terme reste imprécis. Alors qu’est-ce que c’est ?

Les droits d’auteur sont l’ensemble des prérogatives exclusives dont dispose un auteur (ou ses ayants droits, en cas de décès par exemple) sur ce qu’on appelle « une œuvre de l’esprit ». Ces droits se divisent en droits moraux et en droits patrimoniaux. Ils vous appartiennent, sans la moindre formalité administrative, dès la création de votre œuvre. Autrement dit, nul besoin de déclarer à quiconque que vous avez écrit un roman pour que vos droits soient reconnus. (article L. 111-1 du code de la propriété intellectuelle qui dispose que « l’auteur d’une œuvre de l’esprit jouit sur cette œuvre, du seul fait de sa création, d’un droit de propriété incorporelle exclusif et opposable à tous. Ce droit comporte des attributs d’ordre intellectuel et moral ainsi que des attributs d’ordre patrimonial »). Cette définition est valable pour toutes les œuvres de l’esprit mais pour des raisons pratiques et contextuelles, je me concentrerai sur l’application éditoriale de ces droits d’auteur.

Les droits moraux

Ils sont au nombre de quatre :

  • Le droit de paternité : en tant qu’auteur, votre nom et votre qualité doivent être mentionnés sans équivoque sur la couverture de votre livre.
  • Le droit de divulgation : vous êtes le seul à pouvoir décider du moment et des modalités de communication de votre œuvre au public. Quiconque le ferait sans votre accord préalable serait dans l’illégalité.
  • Le droit au respect de l’intégrité : vous pouvez vous opposer à toute modification, déformation ou mutilation de votre création, ou à tout changement qui porterait atteinte à votre honneur ou à votre réputation. Personne ne peut vous faire dire ce que vous n’avez pas dit et le détournement de vos propos, sortis de leur contexte, pour en changer le message, est puni par la loi.
  • Le droit de retrait (Attention, ce droit ne s’applique pas dans tous les pays. Il est valable en France, mais pensez à vérifier si vous publiez en Suisse ou en Belgique.) (lié au droit de repentir) vous autorise à retirer votre livre de la vente, mais  moyennant indemnisation de l’ayant -droit. Si vous signez avec un éditeur, vous pouvez donc décider de retirer votre œuvre du circuit commercial mais vous devrez indemniser l’éditeur pour les fonds qu’il a engagés. Ce droit n’existe pas dans tous les pays.

Ces droits moraux sont inaliénables (vous ne pouvez pas les vendre), perpétuels (pas dans tous les pays, mais c’est le cas en France) et imprescriptibles (ce n’est pas parce que vous n’en faites pas usage qu’ils ne vous appartiennent plus.)

Les droits patrimoniaux

Encore une fois, ils sont quatre, dont trois concernent directement l’édition :

  • Le droit de reproduction, c’est-à-dire de copier tout ou partie de l’œuvre sur un support physique
  • Le droit de représentation, qui autorise à communiquer l’œuvre au public (sur un support autre que physique, et qui pourrait s’appliquer aux ebooks, par exemple, mais ce point reste flou)
  • Le droit de distribution, qui vous permet de décider où et dans quelle quantité sera distribuée votre œuvre
  • Le droit de suite, applicable aux œuvres graphiques et plastiques (donc pas les livres) qui permet à l’artiste de toucher un pourcentage lors de la revente de son œuvre.

Ceux-ci, contrairement aux droits moraux, ne sont pas perpétuels. Ils vous sont garantis à vie, puis sont cédés à vos ayants-droits (vos héritiers et/ou votre éditeur) pour une durée déterminée après votre mort. En France, cette durée est de soixante-dix ans.

De plus, les droits patrimoniaux peuvent être cédés ou partagés, moyennant un contrat de cession ou de licence (voir 2/). Ce sont ces droits patrimoniaux qui peuvent vous permettre de gagner de l’argent grâce à vos œuvres.

En effet, en signant avec un éditeur, vous pouvez lui accorder le droit de reproduire et de distribuer votre œuvre. Il devient alors ayant-droit et peut directement exercer ses droits patrimoniaux. Le contrat doit préciser quels droits patrimoniaux vous cédez (vous pouvez n’en céder qu’une partie), quels modes d’exploitation vous autorisez (par exemple, si vous acceptez une exploitation audio-visuelle, ou si vous acceptez la production de produits dérivés, en plus de la publication pure et simple), et quel est le montant de votre rémunération, généralement exprimée en pourcentage du prix de vente de l’œuvre.

2/ Cession ou licence ?

Ce sont les deux formes que peuvent prendre votre contrat d’édition, et la distinction est assez simple : dans le premier cas, vous renoncez totalement à vos droits patrimoniaux d’auteur, dans le second, vous les prêtez.

Si vous signez une cession de droits, l’éditeur a l’autorisation sans limite de durée d’exploiter les droits patrimoniaux sur l’œuvre désignée. Il est propriétaire, au même titre que vous, des droits sur l’œuvre et pourra les exploiter de manière exclusive jusqu’à l’expiration de la validité de ces droits, c’est-à-dire jusqu’à soixante-dix ans après votre mort. Ce n’est pas le cas de figure le plus répandu, notamment au sein des petites maisons d’édition. Ajoutons que si vous êtes un petit auteur (pas petit par le talent, mais par la reconnaissance, bien évidemment 😉 )publié chez un petit éditeur, ce mode de publication n’a pas grand intérêt. Il est surtout profitable à l’éditeur pour de grands auteurs dont l’œuvre a une pérennité assurée. Pas la majorité d’entre nous, malheureusement.

La plupart des éditeurs vous feront signer un contrat de licence, qui mentionnera pour combien de temps vous lui accordez le droit d’exploiter votre œuvre. Un an, deux ans, cinq ans… Tout est question de préférences de l’éditeur et d’exigences de l’auteur. Cette licence s’appliquera sur un ou plusieurs droits patrimoniaux – certains auteurs, par exemple, choisissent d’éditer leur roman en format numérique chez un éditeur et en format papier chez un autre éditeur – et peut comporter une clause de reconduction tacite. Par exemple, vous signez pour un an, et, lorsque cette année a expiré, si vous ne vous manifestez pas pour reprendre vos droits, ils sont à nouveau accordés à l’éditeur pour la même durée. Généralement, si vous souhaitez récupérer vos droits, le contrat comportera également une clause de préavis de quelques mois afin que l’éditeur puisse prendre les dispositions nécessaires à la cessation de commercialisation de votre œuvre.

EDIT: Une cession partielle (c’est-à-dire d’une partie des droits seulement, ou pour une durée limitée), correspond à une licence. Par exemple, si dans un contrat il est écrit « la présente cession est consentie pour une durée de deux années », il s’agit d’une licence pour deux ans. L’erreur terminologique ne donne pas le droit à l’éditeur de s’approprier vos droits indéfiniment, les dispositions du contrat prévalent.

 Suite de la série très bientôt!

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Les éditions du Petit Caveau par Ambre Dubois

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editions_du_petit_caveau_logo[Espaces Comprises] Pouvez-vous raconter la naissance des éditions du Petit Caveau ?

Ambre Dubois : Bonjour, les éditions du Petit Caveau ont vu le jour en 2008, cela fait donc déjà presque 6 ans. Au départ, tout est venu d’un forum qui regroupait des fans de littératures vampiriques. À l’époque, la mode de la bit-lit n’avait pas encore envahi nos étagères et nous guettions avec vigilance chaque sortie un tantinet fantastique. De plus, très peu d’auteurs francophones étaient édités. Alors l’idée est venue de permettre à ces auteurs, par le biais d’une petite structure, de pouvoir publier des textes fantastiques et de combler, par la même occasion, notre soif de littérature vampirique.

[EC] Quelle est votre ligne éditoriale ?

Pour le moment, elle se limite uniquement à de la littérature vampirique. Nous acceptions donc les romans, les novellas, les recueils de nouvelles… Et pourquoi pas un jour si l’occasion se présentent les BDs ou les mangas…

[EC] Quel est votre public ?

Il est essentiellement féminin, mais nous comptons aussi des lecteurs fidèles. Nous comptons des clients très fidèles qui prennent le soin de précommander à chaque sortie nos nouveaux titres. Nous en profitons pour les remercier très chaleureusement. Sans eux, l’aventure serait impossible !

[EC] Comment se déroule la soumission ?

L’auteur nous envoie son manuscrit par mail (lorsque les soumissions sont ouvertes, ce qui n’est pas le cas pour le moment). Ce dernier est alors pris en charge par un comité de lecture. Chaque titre est lu par 3 personnes minimum. Nous tenons à être certains de ne pas passer à côté d’un texte susceptible de nous intéresser. En cas de doute, d’autres lecteurs lisent également le récit. Il faut en général environ 3-4 mois avant que nous renvoyions notre réponse.

[EC] Comment choisissez-vous un texte ?

Tout d’abord, il faut que l’histoire de base nous plaise, c’est évident. Mais il est aussi important que le style de l’auteur ne demande pas trop de retravail car nous sommes une petite structure de bénévoles et nous assumons les corrections sur notre temps libre. Tout est donc une question d’équilibre entre le contenu du récit et sa présentation. Et puis, bien sur, il y a les gros coups de cœur. 😉

[EC] Qu’est-ce qui vous rebute dans un manuscrit ?

Des fautes à chaque mot, un style lourd, des dialogues inutiles… mais aussi des récits très formatés qui se veulent des copies de Twilight. Dernièrement, nous avons reçu énormément de manuscrits se déroulant dans un cadre scolaire et racontant des « amours » entre humains et vampires. Nous comprenons que les romans de Stephenie Meyer aient inspiré beaucoup de monde, mais parfois cela frise l’overdose.

[EC] Quels conseils donneriez-vous aux auteurs qui se lancent ?

De bichonner leurs textes le plus possible, de faire en sorte qu’ils soient le plus abouti, surtout du point de vue du style, de l’orthographe… Un texte qui se lit facilement apporte déjà un premier abord positif. Et puis, il faut écrire ce que l’on aime, ne pas spécialement essayer de se couler dans un moule bit-lit ou fantasy… L’originalité d’un récit est toujours un plus, mais on se rend compte aussi que des histoires très simples peuvent être très agréable à lire si elles sont bien écrites. Il n’y a pas de recette miracle.

[EC] Comment se déroule la publication d’un texte ?

Une fois le manuscrit accepté, nous proposons un contrat à l’auteur reprenant les différentes conditions de publication. Ensuite, l’auteur doit généralement patienter quelques mois avant que l’on s’occupe de son texte car nous publions peu de titres par an (ce qui fait qu’un manuscrit accepté sortira souvent dans un délai de plus d’une année). Nous réalisons généralement deux tours de corrections sur chaque manuscrit, par deux correctrices différentes. Une fois que l’auteur a terminé de corriger et que le texte est définitif, nous procédons à la mise en page et nous nous occupons des couvertures. Pour la vente, nous fonctionnons avec un système de préventes. Avant que le nouveau titre ne parte à l’imprimerie, nous le proposons en précommande aux lecteurs. Ce système permet de financer en partie le coût de l’impression et de nous aiguiller quant à la quantité d’exemplaires à imprimer pour le premier tirage.

[EC] Publiez-vous en numérique également ?

Oui, depuis quelques mois. D’ailleurs, nous ne cachons pas que ce format a été un vrai souffle d’oxygène pour la maison d’édition car il nous permet de pallier aux difficultés de ventes des romans papier. Nous avons donc converti la majorité de nos romans en format numérique, ainsi qu’une bonne partie des nouvelles faisant partie des anthologies (à l’exception évidemment des textes pour lesquels les auteurs sont réticents à cette conversion). En parallèle de nos sorties « papier », nous publions également des romans feuilletons sous format numérique à raison d’un épisode par mois que le lecteur peut télécharger au fur et à mesure que l’auteur l’écrit. Ce système semble avoir trouvé son public.

[EC] Quel a été le dernier coup de cœur ?

Un roman de Chloé Bourdon qui porte le nom de L’Eau noire et qui sortira courant 2015. Quand je l’ai lu pour la première fois, le titre m’a fait penser à un récit d’Anne Rice, tant l’histoire était sombre et gothique. J’espère que les lecteurs l’apprécieront tout autant…

[EC] Quelle a été votre meilleure vente ?

denotresangDe notre sang d’Adeline Debreuve-Theresette, une novella romantique qui raconte les amours de Dracula et d’une humaine. Bien que ce titre date de quelques années maintenant, il continue de bien se vendre. À croire que derrière les amateurs de vampires, se cachent surtout de grands romantiques !

[EC] Quelles sont vos actualités ?

princedelombreNous avons un joli petit planning de sorties pour 2014 dont nous sommes très fiers. En ce début d’année, nous proposons les romans Vampires d’une nuit de printemps de Lia Vilorë en version numérique ainsi que le dernier tome de la saga romantique de Stéphane Soutoul, Cœur de ténèbres.
Les nouveautés papier arriveront en mars avec la sortie du Prince de l’ombre d’Ambre Dubois et le démarrage de notre nouveau feuilleton numérique écrit par Cécile Duquenne, qui promet d’être très original puisqu’il associera vampires et ovnis !
En mai/juin, nous publierons également un tout nouvel auteur, Thibault Rollet, qui nous proposera de découvrir l’univers décalé de Mr N, le Passe-mondes.
En été, nous sortirons le récit d’un autre auteur inédit, Kath par Kristoff Valla, une saga pleine de rebondissements et d’aventures, dans un genre que nous n’avons pas encore édité.
Et nous clôturerons l’année avec l’ultime tome de la saga du Dernier vampire de Jean Vigne : Rédemption. Bref, entre romance, science-fiction, récits gothiques et d’aventures, nous espérons qu’il y aura là de quoi satisfaire les lecteurs mordus de fantastique !

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[Raphaël Albert] Rue Farfadet

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Hello tout le monde !
C’est le retour de la chronique 100 % VF et 100 % SFFF ! Et ce mois-ci, afin de palier au temps vraiment pourri, j’ai décidé de mettre un peu de soleil et d’humour dans votre PAL… avec Rue Farfadet de Raphaël Albert.

Panam, dans les années 1880 : les humains ont repris depuis longtemps la main sur les Peuples Anciens. Sylvo Sylvain a posé son havresac dans la rue Farfadet, gouailleuse à souhait. Chapeau melon vissé sur le crâne, clope au bec, en compagnie de son fidèle ami Pixel, il exerce la profession exaltante de détective privé et les affaires sont nombreuses ! Des adultères à photographier, des maris jaloux, des femmes trompées, etc. Ni très rémunérateur, ni très glorieux que tout ceci. Alors, Sylvo fréquente assidûment les bars, les cafés et les lieux de plaisir en tout genre où son charme envoûte ces dames…
Jusqu’au jour où, lors d’une banale enquête de routine, il se trouve mêlé à une machination dépassant l’entendement. Le voilà, bien malgré lui, chargé de l’affaire par l’un des trois puissants ducs de Panam. Saura-t-il tirer son épingle de ce jeu compliqué et dangereux ?
Dans ce premier roman Raphaël Albert déploie un art consommé de l’écriture. Il nous fait palpiter au rythme d’une histoire passionnante de bout en bout. Il trousse avec style un personnage attachant et original et invente un univers surprenant de fantasy steampunk où l’on croise centaures taxis, motos à vapeur et magie de bataille.

Vous aimez les styles truculents, bourrés d’humour ? Vous aimez les romans qui mélangent et les genres et les références ? Vous aimez les personnages politiquement engagés ? Vous aimez un récit qui prend son temps, sans pour autant traîner la savate ? Alors les livres de Raphaël Albert sont faits pour vous ! Moi, en tout cas, ça a été une vraie rencontre. Déjà avec l’auteur, lors d’un salon, très sympa et hyper drôle. Ensuite avec ses romans, qui sont tout aussi sympas et tout aussi drôles !
Un coup de cœur dès le premier chapitre… que dis-je ? Dès la première ligne ! En quelques mots, Raphaël Albert instille un style plein d’humour et annonce tout de suite la couleur : il n’y en aura pas de précise, car ce sera un véritable feu d’artifice de mélanges ! Entre polar et fantasy, uchronie et steampunk, chaque phrase participe à la création d’un univers d’une incroyable richesse, tant sur le fond que sur la forme.
C’est un Paris complètement revisité que nous découvrons dans les pas de Sylvo, un farfadet qui officie en tant que détective privé ! Un farfadet dont la figure narrative tarde à émerger, puisque son « je » arrive seulement à la fin du premier chapitre… discret, efficace, comme le vrai détective qu’il est, occupé à espionner un autre personnage. Autant vous dire, j’ai a-do-ré me faire surprendre par cette émergence tardive du vrai narrateur.

En parlant de ce personnage, Sylvo, je l’ai trouvé attachant à tous points de vue : oh, oui, il est un peu macho ; oui, il est très cynique aussi ; et il boit énormément en plus d’être un fieffé fainéant… mais il est aussi courageux et plein d’allant, fidèle à lui-même, et surtout sincère et conscient de ses défauts (qu’il n’essaie pas pour autant d’améliorer, ce qui ne le rend que plus réaliste et attachant quelque part). J’ai trouvé le traitement du personnage extrêmement bien tourné. Cela est dû non seulement à la « voix » unique du personnage, fortement mise en avant par le style, mais aussi aux rapports qu’il entretient avec les autres figures qui traversent le roman : même quand celles-ci sont de pures crapules, Sylvo leur trouve d’une manière ou d’une autre une qualité qui les rachète. Couplée au cynisme éruptif mais jamais vainqueur de Sylvo, j’ai trouvé cela d’une remarquable subtilité, car ça en dit long sur le personnage non pas comme il se voit mais comme il est vraiment. Et ça, perso, ça a gagné mon cœur de lectrice. ^_^

En conclusion, si vous aimez les univers complexes et les personnages a priori superficiels qui se révèlent au final bien plus profonds qu’ils n’y paraissent, je ne peux que vous conseiller de vous jeter sur Rue Farfadet !! Un métissage réussi entre steampunk, polar et fantasy ; une pépite de style et d’humour !

Le tome 2 est d’ores et déjà dans ma PAL, d’ailleurs, je le lis tout bientôt. 😉

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[Wilfried N’Sondé] Les Cœurs des enfants léopards

This entry is part 1 of 3 in the series Les lectures afro-caribéennes de Gangoueus

[Espaces Comprises] veut donner la parole à toute la littérature francophone. En plus de Cécile Duquenne et de sa rubrique SFFF 100 %  francophone, Gangoueus rejoint l’équipe avec sa passion pour la littérature afro-caribéenne. Auteur de l’excellent blog Chez Gangoueus et animateur de l’émission Les Lectures de Gangoueus sur Sud Plateau, il partagera ses coups de cœur.

Que recherche Gangoueus dans la lecture d’un roman ? Une histoire dont la trame est élaborée et cohérente, des personnages denses parfois complexes mais surtout vrais, une écriture, un style pour porter tout cela au firmament. En bonus, si cela est réalisé dans mes thématiques de lecture, ma satisfaction sera sans borne.
Dans le cadre de son premier roman intitulé Le Cœur des enfants léopardsWilfried N’Sondé satisfait à chacune de ces exigences du lecteur que je suis. Pourtant, le sujet qu’il aborde est loin d’être évident à traiter sans tomber pieds et poings liés dans la caricature.
Le personnage narrateur de ce texte est en garde à vue. On ignore les raisons qui l’ont amené à cette situation. C’est une détention musclée, où il s’en prend plein dans la tronche. Mais il ne semble pas être là, derrière les barreaux. Son esprit navigue et poursuit un cheminement fait d’interrogations sur son passé, son histoire de jeune d’une cité quelconque française. Il est noir. Il fait partie d’une petite bande d’amis avec Mireille, fille de pieds-noirs, et Drissa, neveu d’un marabout. Il aime Mireille. Drissa est son meilleur pote.
La pensée vagabonde, usant d’un parcours sinueux, révèle progressivement la nature des relations de cette bande d’amis ainsi que d’autres portraits de personnages gravitant autour de ce noyau et l’évolution de celle-ci dans la cité qui les a vu grandir et pour certains partir. La description du narrateur n’est pas continue entrecoupée par des épisodes tendues de sa détention, par la voix de l’officier de police, ou par celle de Drissa… Mais les errements ne se limitent pas qu’à sa petite vie en France, son introspection le conduit au bord du fleuve Congo, au cœur du culte des ancêtres et du socialisme scientifique que ses parents ont quitté pour l’Europe. Ses pas en culture kongo, s’inscrivent dans la quête identitaire de celui victime trop souvent du délit de faciès, dans le but entre autre de répondre à la question « t’es qui toi ? ».
L’esprit du narrateur embrumé et secoué par la violence policière qu’il subit s’éclaircit progressivement et au fil des pages, tout en levant la lumière sur les différents personnages, leurs folies, ou leurs passions amoureuses, leurs haines ou leurs frustrations, distillent petit à petit des éléments qui ont conduit à la détention.
Tout cela est mené avec maestria par Wilfried N’Sondé qui porte son propos avec élégance, avec énormément de profondeur et finalement beaucoup d’humanité. Je suis tout simplement sous le charme de ce roman que je viens de terminer et qui porte un regard magnifique de justesse sur certaines destinées chaotiques des banlieues françaises mais également sur le désarroi des forces de l’ordre. Rien n’est blanc, rien n’est noir, mais souvent c’est un cycle d’incompréhension.
Un coup de cœur qui touchera par la dimension universelle du propos de l’auteur.
Extrait :

Tu n’as plus aucune raison d’avoir peur, je suis maintenant menotté entre quatre uniformes, à me débattre tout seul avec ma défonce, j’avance tel un zombie, rancard chez la charogne à tout heure du jour ou de la nuit. La police, pourquoi je te dérange autant que ça ? Papiers d’identité, à croire que je t’inquiète, carte de séjour, ah bon vous êtes français ? Délit de faciès, vide tes poches t’as un couteau avec top, tu te défends comment ?
Monsieur le gardien, moi aussi j’en veux de la paix, et des allées fleuries, des sourires, bonjour mademoiselle, comment allez vous madame, je ne veux plus de crachats dans l’escalier, dispute chez l’ivrogne d’en face, des seringues dans le bac à sable, le samedi soir qui finit en faits divers. Fermez les bars-tabacs-tiercé, que nos pères s’assoient dans la salle à manger pour le dîner. Moi, je veux du bleu dans ma vie, des promenades dans les parcs, une belle voiture dans le garage, du gazon vert et frais, un jardin pour l’été. Dommage que tu ne m’entendes pas mon capitaine, j’avais là un bel aveu pour toi !

Page 36, Ed. Actes Sud

Wilfried N’Sondé, Le Cœur des enfants léopards
Edition Actes Sud, 1ère parution 2007, 133 pages
Prix des Cinq continents 2007

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