- [Wilfried N’Sondé] Les Cœurs des enfants léopards
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- [Véronique Tadjo] Loin de mon père
[Espaces Comprises] veut donner la parole à toute la littérature francophone. En plus de Cécile Duquenne et de sa rubrique SFFF 100 % francophone, Gangoueus rejoint l’équipe avec sa passion pour la littérature afro-caribéenne. Auteur de l’excellent blog Chez Gangoueus et animateur de l’émission Les Lectures de Gangoueus sur Sud Plateau, il partagera ses coups de cœur.
Dans le cadre de son premier roman intitulé Le Cœur des enfants léopards, Wilfried N’Sondé satisfait à chacune de ces exigences du lecteur que je suis. Pourtant, le sujet qu’il aborde est loin d’être évident à traiter sans tomber pieds et poings liés dans la caricature.
Le personnage narrateur de ce texte est en garde à vue. On ignore les raisons qui l’ont amené à cette situation. C’est une détention musclée, où il s’en prend plein dans la tronche. Mais il ne semble pas être là, derrière les barreaux. Son esprit navigue et poursuit un cheminement fait d’interrogations sur son passé, son histoire de jeune d’une cité quelconque française. Il est noir. Il fait partie d’une petite bande d’amis avec Mireille, fille de pieds-noirs, et Drissa, neveu d’un marabout. Il aime Mireille. Drissa est son meilleur pote.
Un coup de cœur qui touchera par la dimension universelle du propos de l’auteur.
Tu n’as plus aucune raison d’avoir peur, je suis maintenant menotté entre quatre uniformes, à me débattre tout seul avec ma défonce, j’avance tel un zombie, rancard chez la charogne à tout heure du jour ou de la nuit. La police, pourquoi je te dérange autant que ça ? Papiers d’identité, à croire que je t’inquiète, carte de séjour, ah bon vous êtes français ? Délit de faciès, vide tes poches t’as un couteau avec top, tu te défends comment ?
Monsieur le gardien, moi aussi j’en veux de la paix, et des allées fleuries, des sourires, bonjour mademoiselle, comment allez vous madame, je ne veux plus de crachats dans l’escalier, dispute chez l’ivrogne d’en face, des seringues dans le bac à sable, le samedi soir qui finit en faits divers. Fermez les bars-tabacs-tiercé, que nos pères s’assoient dans la salle à manger pour le dîner. Moi, je veux du bleu dans ma vie, des promenades dans les parcs, une belle voiture dans le garage, du gazon vert et frais, un jardin pour l’été. Dommage que tu ne m’entendes pas mon capitaine, j’avais là un bel aveu pour toi !
Page 36, Ed. Actes Sud
Wilfried N’Sondé, Le Cœur des enfants léopards
Edition Actes Sud, 1ère parution 2007, 133 pages
Prix des Cinq continents 2007
Touché par cet extrait, beaucoup de justesse, ce qui n’est pas simple vu le sujet…
Félicitations à Gangoueus pour cette belle promotion ! 🙂