Parole à Jérôme Cigut, créateur des 24 Heures de la nouvelle qui se déroulera du 31 mai au 1er juin prochain.
Les 24 Heures de la Nouvelle 2014, qu’est-ce que c’est ?
C’est un grand jeu, un potlatch à l’ère du numérique.
Concrètement : du 31 mai au 1er juin prochains, des dizaines d’auteurs francophones (39 l’an dernier, au moins 44 cette année), confirmés ou non, vont se donner 24 heures pour rédiger chacun une histoire complète d’au moins 5 000 signes (espaces comprises ^^) autour d’une contrainte qui sera dévoilée à la dernière minute. Chaque auteur pourra ensuite publier son texte sur le site des 24 Heures, ainsi que sur son propre blog.
Tout le monde peut participer — les inscriptions sont ouvertes jusqu’au 25 mai. Ah, et la contrainte n’est pas choisie par une éminence grise : elle est tirée au sort parmi toutes les propositions des participants. Jusqu’à la dernière minute, personne ne sait ce qui va s’appliquer.
D’où vient l’idée ?
À l’origine, d’une BD qui m’avait fait découvrir Boulet, Le Ténébreux. L’histoire m’avait beaucoup impressionné, mais je suis tombé de ma chaise quand j’ai appris qu’il l’avait réalisée en une seule journée, lors des 24 Heures de la BD d’Angoulême.
J’aurais adoré faire la même chose, mais je suis incapable de dessiner, même si ma vie en dépendait. Par contre, je sais (vaguement) écrire… et de fil en aiguille, c’est ainsi que nous avons lancé les 24 Heures de la Nouvelle l’an dernier.
Pourquoi « donner » gratuitement une nouvelle sur Internet, au lieu de l’envoyer à un éditeur ?
Pour la même raison que beaucoup d’auteurs tiennent un blog, une page Facebook, un compte Twitter, un Pinterest : pour toucher les lecteurs, exposer son identité et son univers. Mais au final, nous sommes des écrivains. Ce que nous faisons, ce que les gens attendent de nous, ce sur quoi ils nous jugent, ce sont d’abord et avant tout nos histoires. Donc pourquoi ne pas proposer à l’occasion un avant-goût, une bouchée ?
Et puis je ne suis pas sûr qu’Internet et l’édition traditionnelle s’opposent réellement. Si vous adorez les notes de Boulet, vous pouvez les acheter sur papier chez Delcourt. De même, Cory Doctorow offre la version électronique de ses romans sur son site depuis des années : si vous les aimez, vous pouvez les acquérir.
L’attrait supplémentaire des 24 Heures, ce sont les liens et les opportunités qu’elles créent. Au fil des pages, les internautes peuvent découvrir des auteurs qu’ils n’auraient peut-être jamais connus autrement, aller explorer leurs blogs, et de là peut-être franchir le pas et lire leurs autres écrits. Cela a beaucoup moins de chances d’arriver si chacun se focalise uniquement sur son propre blog et dépend du hasard des moteurs de recherche.
D’autant que sans les 24 Heures, ces nouvelles n’auraient peut-être jamais existé.
C’est vrai : nul ne sait si vous auriez eu l’idée de cette histoire si une autre contrainte avait été tirée au sort.
De plus, je vois cela comme un texte « bonus » : sans les 24 Heures, peut-être ne passerais-je que deux ou trois heures à écrire ce week-end-là — certainement pas assez pour rédiger une histoire complète.
Ah, et j’oubliais : c’est aussi très drôle de découvrir après coup comment les amis ont réussi à se dépatouiller de la contrainte, de leur côté !
Des coups de cœur, parmi les textes de l’an dernier ?
Beaucoup ! J’ai beaucoup aimé Une langue morte, d’Alex Evans — un conte d’Heroic Fantasy qui rappelle le Robert E. Howard de Conan le Barbare, mais avec une sensibilité féminine très intéressante. Également Mile High Club de mon camarade hongkongais Stewart McKay (en anglais), qui a sublimé la contrainte pour bâtir un récit choral, dans un avion. Et que dire d’Il suffit de passer le pont de Luce Basseterre, qui nous a dynamité la contrainte façon puzzle : il fallait caser cinq titres de chansons du même artiste, elle en placé… quarante-deux. Allez les lire ! Et peut-être, rejoignez-nous ?
Alors, partants ? Vous avez jusqu’au 25 mai pour vous inscrire ! Clic !
Ping : Quoi de neuf cette semaine? (du 19 au 25 mai) - Catherine Loiseau - Catherine Loiseau