Chers jeunes auteurs,
J’ai été comme vous. D’ailleurs, je suis toujours une « jeune auteure », puisque je n’ai pas encore fait mes preuves dans le milieu de l’édition. Mais j’ai déjà essuyé pas mal d’échecs et vu des vertes et des pas mûres. Même si je suis partisane du « il faut tomber pour apprendre », il n’y a aucun mal à dire à ceux qui viennent juste derrière nous « attention, il y a un trou ». Alors, si je peux vous éviter de tomber dans un trou, peu importe sa taille, je ne vois pas pourquoi je ne le ferais pas.
Voici donc cinq conseils. Ce ne sont que des suggestions, après, vous êtes libres de les suivre.
Ou pas.
01 – N’envoyez jamais de premiers jets.
Qu’est-ce qu’un premier jet ? C’est l’histoire (avec un début, un milieu et une fin) telle que vous l’avez écrite la toute première fois, sans relecture ou correction. En bref : c’est un brouillon complet ! Un roman publié n’est pas un premier jet : il est relu, corrigé, décortiqué, pendant des mois s’il le faut. C’est un réel travail. Prenez conscience qu’écrire c’est 5 % d’inspiration et 95 % de sueur.
Et des larmes aussi.
02 – Ne vous lancez pas dans une multilogie dès le départ.
Les trilogies ont toujours existé, mais depuis quelques années, on n’entend que ça de la part des jeunes auteurs. Écrivez d’abord un roman, avec une vraie fin (les fins ouvertes sont bien sûr acceptées). Travaillez-le vraiment. Si vous avez envie d’en faire une série, le seul conseil que je vous propose c’est de la terminer avant de la soumettre. Ça vous évitera des blocages d’écriture ou même des incohérences dans l’intrigue.
03 – Faites attention au fond et à la forme.
Entourez-vous de personnes de confiance (ou des professionnels) et corrigez minutieusement votre roman. Être éditeur, c’est un métier. Des centaines de manuscrits s’accumulent et un éditeur ne va pas perdre son temps à décortiquer votre écriture. Faire des fautes ou écrire en langage texto (j’exagère à peine) vaut à votre tapuscrit un passe-droit dans la corbeille. Faites-vous bêta-lire et/ou corriger, et respectez les normes typographiques (elles peuvent changer selon les éditeurs, renseignez-vous).
04 – Renseignez-vous et ciblez bien les éditeurs.
N’envoyez pas vos tapuscrits n’importe où ! Renseignez-vous ! Sachez cibler vos envois. Ne vous étonnez pas d’être refusé (malgré la qualité de votre prose) si vous soumettez un roman avec des vampires à un éditeur qui ne fait que de la blanche (= sans une once de fantaisie possible). Élargissez votre listing, il n’y a pas que les éditeurs germanopratins. Fouillez un peu, demandez des avis, prenez en compte les témoignages sur le web. Vous ne pourrez pas dire qu’on ne vous a pas prévenu.
05 – Ne payez ni éditeur ni agent littéraire, jamais.
Si vous ne vous lancez pas dans l’autopublication, ne payez jamais pour être publié.
Si un agent littéraire vous demande de le payer avant de démarcher pour votre roman, fuyez. Un agent est payé avec un pourcentage de vos droits d’auteur, alors il a intérêt à bien vendre votre roman.
Si un éditeur vous demande une participation financière, fuyez. C’est du compte d’auteur et vous serez grillé pour pas mal de temps.
Enfin, écrivez.
Écrivez tout le temps.
Billet publié le 22 mai 2013
Bon, je n’ai plus qu’un trou devant moi (puisque les quatre autres ont été bouchés) mais pas des moindres… j’écris une trilogie…
Mais non. 🙂
Comme dit dans la lettre, je ne pourrais que te conseiller de le terminer avant de le soumettre. Des choses auxquelles on n’a pas penser peuvent arriver au cours de la rédaction et peuvent entraîner des changements de la base. Alors, si cette base est déjà publiée, on n’y peut plus rien et on a une fondation bancale.
Merci pour ces infos.
J’ai une question : pourquoi être édité à compte d’auteur revient-il à se griller pour pas mal de temps ?
Merci.
La question est assez compliquée ; ne dramatisons pas la chose à l’extrême : vous avez des chances de trouver un éditeur même si vous avez été édité à compte d’auteur… Mais pas sur le même texte. Pourquoi? D’abord parce que la plupart des éditeurs n’acceptent que les textes inédits (question de rentabilité: il ne sert à rien d’engager des frais pour un texte que l’on pourra trouver ailleurs!), ensuite parce que beaucoup ont en tête l’idée que si l’on est publié à compte d’auteur, c’est qu’on a été refusé partout ailleurs. Et qu’il y a une raison à cela…
Les éditeurs cherchent des auteurs persévérants (donc qui ne se décourageront pas après deux refus), travailleurs (qui accepteront donc de bonne grâce, malgré la difficulté, la dure étape des corrections éditoriales) et impliqués dans la promotion de leur oeuvre.
Il existe une catégorie d’auteur qui passe par le compte d’auteur parce qu’ils refusent tout cela: pour eux, leur roman est excellent tel quel et devrait donc être publié immédiatement, sans la moindre correction et bien sûr se vendre tout seul. Ces auteurs atterrissent souvent en compte d’auteur (qui en a d’ailleurs fait un de ses arguments de vente: « Nous respectons votre oeuvre et n’exigeons aucune correction »). Et les autres éditeurs n’ont pas envie de travailler avec eux.
L’exemple typique d’une minorité qui peut grandement nuire à la majorité…
Quand un éditeur voit dans ta biblio que tu as été publié en CA, il n’a pas forcément envie de te prendre. On a une étiquette de « publication de vanité » et après, je rejoins ce que dit Alice, ça te donne une réputation d’auteur imbu de soi-même, qui préfère payer pour être publié plutôt que de travailler son texte et passer par la porte classique…
Beaucoup d’auteurs enlèvent ces ouvrages de leurs biblios quand ils essaient de soumettre.
Alors… 01, j’ai fait, 02, j’ai fait, 03, j’ai fait, 04, j’ai fait… bon, ben, ces conseils m’auraient été utiles 😉
On était fait pour s’entendre ! 😀
Et ceux qui se publient en tant qu’auteur/éditeur même combat que pour ceux à compte d’auteurs ?
Autopublié, vous voulez dire ? Comme je le dis dans la lettre, à part l’autopublication, vous ne devez jamais rien débourser. Mais je crains ne pas avoir compris votre commentaire…
Bonjour !
Je ne suis pas concernée personnellement par la question mais cette question sur les éditeurs et le compte d’auteur me rend curieuse : comment ça peut marcher ?
C’est valable si c’est mis dans sa bio, je suppose : « ce manuscrit est celui d’un roman que j’ai autoédité… » Certes. Mais, si l’auteur ne le mentionne pas (et l’auteur le mentionne-t-il, généralement ?), si le manuscrit passe le premier stade du comité de lecture, arrive dans les mains de l’éditeur ou du directeur de correction qui voit en lui un potentiel commercial lui faisant se dire qu’il a envie de le publier, je suppose qu’il ne va pas faire marche arrière en apprenant que le roman a été auto-édité, non ? Et je suppose aussi que les éditeurs/membres des comités de lecture, ne font pas de recherches pour vérifier ce point avant d’entamer la lecture d’un manuscrit.
Du coup, ce ne serait pénalisant que si l’auteur en question en parle avant de présenter son manuscrit (en lettre d’accompagnement, par exemple), ou est-ce que je me trompe ?
Sauf que dans le contrat d’édition, il peut être mentionné des clauses qui empêchent la réédition d’un ouvrage. Certes l’éditeur ne cherchera peut-être pas de son côté, mais dans ce cas, c’est à l’auteur de signaler que son ouvrage a déjà été commercialisé sous une forme ou un autre.
D’accord. Dans ce cas-là, effectivement, c’est donc au moment de la signature que ça peut bloquer. Je comprends.
Merci pour la réponse. 🙂
Pour l’instant, le seul cas que j’ai vu s’en sort bien, puisque c’est un auteur qui avait longtemps posté son roman sur le net + s’était auto-édité avant de proposer son manuscrit à une grosse maison d’édition (Gallimard) et qui a finalement été pris. Mais, d’un autre côté, l’éditeur lui a fait faire un gros boulot de réécriture : coupures d’une bonne partie (un tiers, il me semble), révision de la chronologie de l’histoire avec des mélanges passé/présent… A l’arrivée, le roman n’est pas totalement différent mais pas totalement le même non plus et cette conversation me fait me demander si, en plus de vouloir potentialiser les chances de ce roman de rencontrer les lecteurs, il n’a pas pu y avoir aussi une volonté de créer une différence nette entre la version avant-publication chez eux, et celle suivante, du coup… Et bon, il ne l’aurait peut-être pas fait pour tous les manuscrits non plus et je suppose que les maisons d’édition, en plus de ne pas forcément vouloir le faire, n’ont pas forcément non plus toutes les moyens de s’engager dans un aussi travail de réécriture avec leurs auteurs.
(il manque un mot) : un aussi gros travail de réécriture
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