Nous sommes à une époque où la façon de lire évolue. Du tout papier, nous passons au papier+numérique. Pourtant, certains lecteurs, et même auteurs, sont très catégoriques : pour eux, le numérique ne remplacera pas le papier et l’écrit perd son âme s’il doit être transmis à travers un écran.
Personnellement, en tant que lectrice, ma vie entre deux continents m’a poussée plus rapidement vers le numérique. Avoir ma bibliothèque sur moi en permanence est un atout non-négligeable. En tant qu’auteur, je suis publiée sous les deux supports. Est-ce que l’écran et l’encre électronique sont de moins bons ambassadeurs de nos écrits ? Je ne le pense pas. Nos textes doivent faire rire ou pleurer ou pleurer de rire (cela dépend de votre genre de prédilection !), peu importe le format. Ce sont les mots, les ambassadeurs de vos histoires, pas le papier ni l’écran.
J’ai demandé à quelques auteurs, papier et numérique, leurs avis.
Isabelle Wenta
Sur mes 5 romans publiés, 2 sont publiés à la fois sur papier et en numérique, les 3 autres uniquement en numérique. Les tomes 1 et 2 de La Saga d’Orion ont été publiés avant le « boum » du numérique et des tablettes, la question ne s’est donc pas posée à l’époque, il n’y avait que le papier. Puis les éditions Voy’[el] ont créé leur branche « numérique » et mes 2 romans y ont été inclus, tout naturellement dirais-je. Pour les 3 tomes de GeMs, écrits en collaboration avec Corinne Guitteaud, c’est un peu différent. Nous avons choisis de ne les publier qu’en numérique pour l’instant, car ça revient moins cher.
Personnellement, en tant que lectrice, je préfère le papier. Pour diverses raisons. Je ne suis pas à l’aise quand je lis sur un écran, j’ai de gros soucis de vue et le prix d’une liseuse est actuellement hors de mes moyens. Mais ce n’est pas pour autant que je vais rejeter le numérique en tant qu’auteur, car ce serait littéralement « cracher dans la soupe ». C’est en numérique que je fais le plus de ventes, il faut être lucide.
Je ne vois pas en quoi l’un serait supérieur ou inférieur à l’autre. Je ne pense pas non plus que le « numérique tuera le papier ». Il s’agit d’une nouvelle façon de lire, sans doute plus pratique, différente, mais pas obligatoirement antinomique. Et pour moi, un « auteur numérique » n’est pas meilleur ou moins bon qu’un « auteur papier ». Il n’y a aucune différence.
Philippe Devos
À l’époque de mon premier livre, la littérature numérique était peu répandue, aussi mon choix s’est-il naturellement tourné vers des éditeurs classiques. J’ai assez vite perçu les contraintes du livre papier aujourd’hui pour un petit éditeur : la diffusion et la distribution ont un coût et sont loin de pouvoir être assurées de manière optimale si vous n’avez pas signé chez un grand groupe. Les prix des ouvrages sont souvent assez élevés, et l’essentiel des ventes repose sur les épaules de l’auteur durant les salons.
Ayant commencé à écrire sur internet, et face à la démocratisation des liseuses, j’ai choisi pour mon deuxième ouvrage de tenter l’aventure du numérique. Premier constat : le numérique permet des prix beaucoup plus abordables pour le lecteur. De plus, à partir du moment où l’éditeur est investi dans le milieu, vous avez la garantie d’être recensé sur de nombreuses plate-formes. L’avenir pour les petits éditeurs selon moi, c’est de proposer leurs livres au format numérique, afin de limiter certains coûts, et l’impression à la demande, afin de ne pas se couper d’une partie du lectorat. Les deux supports sont complémentaires.
Anne Rossi
Je suis publiée en papier pour mes romans juniors (Suzy Online chez les Lucioles, Lita et les Corsaires rouges chez les Roses Bleues…) et en numérique pour mes séries de romance (Les Enfants du feu et Passeurs d’ombre chez Numeriklivres, les Enkoutan chez HQN, Les Yeux de tempête et Chronique d’un amour fou chez Láska…).
À la base, il faut savoir que je lis en numérique depuis très longtemps. J’ai possédé l’une des toutes premières liseuses sur le marché, à l’époque. Plusieurs raisons à cela : je lis énormément et je manque de place pour entasser les livres papier, je lisais beaucoup de textes en ligne et la liseuse est beaucoup plus confortable pour la vue qu’un écran d’ordinateur. Enfin, je n’ai jamais sacralisé le livre papier dans la mesure où j’empruntais ou achetais d’occasion mes livres, qui n’ont donc jamais été en très bon état (entre les pages qui manquent, les taches, les odeurs de tabac ou d’humidité…). Donc, au moment de chercher un éditeur, je n’avais aucune prévention contre le numérique, au contraire.
Cependant, la situation n’est pas tout à fait la même pour la jeunesse et la romance. La jeunesse se vend à l’heure actuelle encore très peu en numérique. D’ailleurs, il existe très peu d’éditeurs numériques jeunesse. Au contraire, la romance a bénéficié depuis le départ d’un élan supplémentaire donné par le numérique, c’est l’un des genres qui se vend le mieux dans le secteur.
Au final, j’ai été publiée en papier pour du jeunesse, par de petits éditeurs.
Avantages :
- Le livre est un objet concret qu’on peut prêter, dédicacer ;
- Accessible à tout le monde (sous réserve de la distribution) ;
- On peut organiser des dédicaces en librairie ou en salon, voire des interventions dans les classes (pour le jeunesse) ;
- Le livre papier jouit encore d’une meilleure image de marque auprès du public.
Inconvénients :
- Pour les petits éditeurs, les ventes se font principalement sur les salons, il faut donc être très présent de ce côté ;
- Toujours pour les petits éditeurs, les tirages ne sont pas très importants (donc les ventes non plus) ;
- La publicité est peu importante.
Pour le numérique, j’ai été édité à la fois par un éditeur généraliste, bien positionné sur le marché (Numeriklivres), un petit éditeur spécialisé romance (Láska) et un gros éditeur spécialisé romance (HQN).
Avantages :
- La diffusion est bien plus importante ;
- Souplesse au niveau des prix, de la promotion ;
- Souplesse au niveau des formats : mon format de travail privilégié, les séries à épisodes, n’aurait pas sa place en édition papier ;
- Innovation (supports de dédicace, événements…).
Inconvénients :
- Pas ou peu de présence en salons ;
- Non accessible aux personnes pas équipées en liseuses, tablette, Smartphone ou ordinateur.
Au final, l’important, c’est d’avoir le choix…
Article vraiment très intéressant !
Je suis également très partagée entre les deux, que ce soit en tant que lectrice, ou en tant qu’auteur.
Je lis presque autant sur liseuse que sur papier (c’est tellement pratique !), mais quand un livre numérique m’a vraiment touchée, j’essaie toujours de le trouver en format papier pour lui faire une place d’honneur dans ma bibliothèque. Je suis tellement fière d’avoir de beaux et bons ouvrages dans ma bibliothèque.
Du coup, en tant qu’auteur, j’ai, certes, envie que des tas de lecteurs m’aient dans leur tablette et m’emportent partout avec eux (d’autant que le numérique est généralement plus rentable aussi pour l’auteur). Mais trouver mon livre papier dans les rayons d’une librairie, pouvoir en caresser la couverture en sachant que (peut-être) des lecteurs feront de même, qu’ils l’achèteront pour l’exhiber fièrement dans leur bibliothèque (rêvons…), c’est terriblement tentant !
Du coup, oui, je suis très partagée. Et je pense (et j’espère) que ce débat est sans fin. Qu’il y aura toujours des livres papiers ET des livres numériques.
Je partage cette envie d’avoir l’exemplaire papier d’un livre numérique qu’on a aimé, uniquement parce que j’ai l’habitude d’effacer les e-books après lecture. Je ne relis jamais et je sais qu’ils seront en double sur mes comptes, donc je ne les garde si dans ma liseuse ni dans mon ordinateur.
Par contre, j’espère que le débat cessera un jour, parce que non, le papier ne va pas mourir, et c’est une forme de dénigrer le numérique…
Je lis également sur les deux formats, car je suis très souvent dans le train. Pour moi ces deux formats sont ultra-complémentaires !
Je lis dans les deux formats et je publie dans les deux formats, je suis pour la paix des ménages quoi 😉
Les contraintes urbaines (transports) font que je me tourne de plus en plus vers le numérique pour la lecture cependant.