On ne programme pas une soirée avec des amis et du pop corn pour voir un film comme Odette Toulemonde. C’est un film sur lequel on tombe par hasard en zappant.
Odette Toulemonde d’Éric-Emmanuel Schmitt est un petit bijou sans prétention, léger et décalé. Odette, jouée par Catherine Frot, est une quadragénaire comme il y en a des millions : veuve, elle travaille dans un grand magasin à Charleroi, a deux enfants et les seuls moments de répit dans sa vie sans excitation sont la musique de Josephine Baker et les romans de Balthazar Balsan (joué par Albert Dupontel). Lorsque ce dernier dédicace à Bruxelles, Odette est incapable de lui dire ne serait-ce que son prénom. Pour compenser, elle lui écrit une lettre pour le remercier de tout ce qu’il lui offre quand elle lit ses livres. Et sans le savoir, cette même lettre, écrite dans du papier à lettres pour adolescentes, va sauver Balsan (Comment ? Regardez le film, ça vaut le coup !).
Balsan est un écrivain populaire à succès, est riche, sa femme est belle, son fils intelligent est dans une pension quelque part. Il a tout pour être heureux, vrai ? Faux. Parce que ce film, sous fond de légèreté, lance le débat sur l’écrivain populaire (acclamé par le public, méprisé par les critiques) versus l’écrivain classique (encensé par les critiques). Un des moments qui m’a le plus marqué, c’est lorsque l’écrivain et animateur d’une émission littéraire Olaf Pims (Jacques Weber) critique le dernier roman avec l’argument « c’est un roman pour les coiffeuses et les ménagères » et jette le livre avec dédain par-dessus son épaule. Ce n’est ni intellectuel ni bon. Les « petites gens » lisent Balsan par millions, mais le milieu parisien le boude. Pour Balsan, c’est dévastateur.
Ce film montre l’éternel mépris envers les lecteurs d’écrivains comme Marc Levy et Guillaume Musso parce que ce n’est pas du Victor Hugo ou du Flaubert. Mais, si Bill, notre lecteur préféré, veut lire du Flaubert… il va prendre un livre avec Flaubert marqué sur la couverture, n’est-ce pas ? Lire est une activité personnelle. À chacun ses émotions devant une histoire, devant une plume. On peut aimer un écrivain classique et un écrivain populaire de la même manière pour des raisons totalement différentes.
Pour nous autres écrivains, apprentis ou renommés, la question reste essentielle. Veut-on écrire pour un petit cercle bien-pensant ? Ou alors pour le plus grand nombre ? Est-ce vraiment un mal d’être un écrivain populaire ? Est-ce un mal de vouloir que les coiffeuses, les vendeuses, les maraîchères, les ménagères de tous les âges nous lisent ?
Oublions les petits complexes, écrivons ce que nous aimons, lisons ce que nous voulons. Un tiers de la population doit être ménagère de moins de cinquante ans (le choc !).
Mais aujourd’hui, il y a un terme plus in pour ça, moins champêtre : housewife. Du français wife, évidemment.
Le livre et le film m’avaient beaucoup touché a leurs sorties. Éric Emmanuel Schmitt met effectivement le doigt sur ce dilemme que peut connaître l’écrivain. Personnellement, l’écriture, raconter une histoire en général c’est pour soi d’abord, mais aussi et surtout pour partager aux autres sa part de rêves, son monde. Je ne vois pas pourquoi on critique les auteurs dit « populaire » qui ont le méritent de faire évader les lecteurs de ce monde, de leur donner quelques heures durant une dose de bonheur. La phrase qui m’aura le plus marqué c’est Odette face a l’éditeur de balsan « les livres sont très bien mais moi il me faut un dictionnaire et un tube d’aspirine pour les comprendre » et ce sont eux que les critiques acclament.
Enfin tout ça pour dire que c’était un article très intéressant
Il n’y a rien de plus embêtant que de lire un roman en cherchant la signification d’un mot par phrase. On ne s’évade plus, à ce stade ! 🙂
Le problème qui se pose souvent avec les gens c’est que si les livres ne sont pas truffés de mots ronflants, de tournures poético-romantico-trucmuche, ce ne sont pas de bons livres.
Je veux faire une manif : la lecture c’est personnel xD
Écrire pour les ménagères, pardon housewives, c’est pas bien. Faut pas.
Je suis une fan absolue d’Odette Toulemonde !! J’ai lu le livre il y a des années ; il m’a bouleversée, tant je me suis retrouvée autant dans Odette que dans Balsan. Je n’ai vu le film que l’année dernière, mais j’ai autant pleuré qu’en lisant le livre. Je suis tout à fait d’accord avec toi, JoAnn : lire est un acte qui a trait à l’amour et au désir, sentiments qui ne se commandent pas. Je n’ai jamais eu honte d’avoir adoré la saga Twilight (les livres), même si c’est politiquement déplorable et je n’ai jamais pu me faire à Zola. Cela fait-il de moi une inculte ? Je ne crois pas.
En tout cas, Eric Emmanuel Schmitt fait partie des auteurs qui me font rêver et réfléchir, qui m’aident à croire que je ne suis peut-être pas qu’un charlatan de l’écriture et que peut-être, il y a des gens que je peux moi-aussi faire rêver. Il y a de la place pour tout le monde. On ne peut pas mesurer le talent au nombre d’exemplaires vendus, certes, mais pas non plus aux décisions arbitraires d’un groupuscule d’intellectuels éllitises.
(Bon, je me calme et j’arrête là… c’est un sujet brûlant, pour moi, désolée)
* élitistes (pardon)
Je comprends que ce soit brûlant !
Pour chaque instant, nous avons une lecture de choix. Que ce soit un Twilight ou un Prix Nobel, ces lectures nous apportent quelque chose de précis au moment de notre lecture. Et c’est un droit. J’aime Twilight autant que José Saramago, et personne, saine d’esprit, ne comparerait les deux. Et pourtant, ils se côtoient sur mes étagères. Sacrilège pour certains, peut-être.
Une amie me l’a conseillé… 🙂 Être écrivain populaire est mon rêve absolu ; malheureusement, contrairement à ce que prétendent certains, il n’y a pas de recette pour le succès (ça se saurait !). Je ne pense donc pas qu’il s’agisse d’un choix de l’écrivain lui-même. L’écrivain écrit ce qu’il a envie que les gens lisent, mais s’ils le lisent effectivement ou pas, voilà qui ne dépend pas de lui. Ou elle.
Ce serait bien, une recette pour le succès ! 😀
Sinon, pour le reste, on peut toujours moduler son écrit dans l’espoir d’impressionner les critiques plutôt que de se faire comprendre par les masses. Il se fera bouder par le public de toute façon.
Par contre, pour celui qui écrit pour le plus grand nombre, c’est pas sûr qu’il y arrive. (Shame…)