La sélection d’été de Cécile Duquenne

This entry is part 7 of 8 in the series L'été avec [Espace Comprises]

Cécile Duquenne est l’auteur d’Entrechats (Voy'[el], 2010) et de la série Nécrophiles Anonymes publiée conjointement par Voy'[el] et Bragelonne (premier tome, Quadruple Assassinat dans la rue de la Morgue, 2012). Elle tient le blog SFFF 100 % Francophone.

Qu’emporter dans votre valise de vacances cet été ? Une sélection 100 % fun, 100 % géniale et 100 % francophone bien sûr (comment ça, ça fait 300% ?) !

thumb-toxicToxic, la série de Stéphane Desienne aux éditions Walrus. *
Une série Z pour… « zombies ».
Pffff, encore des zombies me direz-vous ? Oui, mais cette fois, non seulement c’est écrit avec talent, mais en plus l’auteur alterne les points de vue entre un groupe d’humains survivants et… un groupe d’aliens ! Le récit prend une tournure particulièrement savoureuse et le suspens, lui, est à son comble : les habitants de l’espace sont-ils venus nous sauver ou nous manger ?
Six épisodes à dévorer sur liseuse, en numérique seulement, et pour un prix dérisoire. En plus, le premier épisode est gratuit… Foncez !

(Résumé du premier épisode)
Si seulement les morts-vivants avaient été le seul problème de l’humanité…
La race humaine tente vaille que vaille de survivre au sein de poches de résistance dispersées. La Terre n’est plus qu’un vaste champ de ruines aux ressources de plus en plus rares. Pour en arriver à un tel cauchemar, notre monde aura dû affronter deux fléaux: un virus inconnu et dévasteur a d’abord décimé la population — la transformant en hordes de zombies — puis débarquèrent des étoiles ceux qui auraient pu être les sauveurs : une armada extra-terrestre. Hélas, pour ces aliens, les hommes ne sont que du bétail dont la chair est un mets des plus appréciés outre-espace… à condition qu’ils ne soient pas contaminés! Car transformés en morts-vivants, les humains n’ont plus aucune valeur. Depuis son Q.G. de Dubaï, Naakrit dirige les opérations qui feront de lui un alien riche : collecter des humains sains et en gérer l’exportation pour ses clients.
Mais avant d’amasser sa fortune, il devra composer avec deux problèmes épineux: Jave, un émissaire venu surveiller son activité, et la prolifération du virus zombie qui menace ses capacités d’approvisionnement. Pendant ce temps, un groupe d’humains cherche à échapper aux zombies et aux extraterrestres. Bien malgré elle, Elaine, une infirmière au caractère bien trempée, endosse le rôle de meneur. Autour d’elle, des hommes et des femmes perdus dans un monde sans repère: Masters est un colonel de l’armée US, Alva une ex-starlette. Bruce est étudiant en biologie, et Hector un ancien dealier colombien tout juste sorti de prison. Et puis, il y a Dew. Un adolescent muet — peut-être autiste— dont personne ne sait rien.
Tous sont bien décidés à reprendre le destin de leur planète en mains. Mais quel espoir peut bien guider ceux qui survivent au milieu de cet enfer ?

kelKel : Noir et Blanc d’Andréa Schwartz, aux éditions Rebelle
Un premier tome idéal pour… voyager.
Kel, c’est la fureur des combats et la douceur de l’amour réunis en un seul livre. Kel, c’est la délicatesse de la culture asiatique mélangée à l’éclat des grandes fresques de fantasy. Kel, c’est un livre émouvant et étonnant où l’héroïne travestie en homme pour s’engager dans l’armée peut rappeler Mulan au début… mais au début seulement !
Un premier tome dans lequel plonger comme dans une eau fraîche…

A l’aube de la Cinquième Ere, les Deux Empires sont une fois de plus au bord de la guerre.
Shelun la Cheveux-Noirs a perdu toute sa famille dans un raid ennemi. Née femme dans un monde dominé par les hommes, elle n’hésite pas à transgresser les interdits et à se travestir pour accomplir sa vengeance.
Or, la guerre est loin d’être la glorieuse aventure décrite dans les cantiques. Quant aux ennemis, ils ne sont peut-être pas tous les monstres qu’elle avait imaginés…

lune-mauve-t01Lune Mauve : La disparue de Marilou Aznar, aux éditions Casterman
Une adolescente qui déménage à Paris pour entrer dans un lycée parisien, une mère disparue qui a laissé un vide béant, un triangle amoureux subtil et une montée progressive du fantastique… Marilou Aznar signe là un excellent roman de Young Adult, intelligent et bien mené, avec un style immersif qui ne vous laissera pas indifférent ! En plus, l’auteur s’intéresse à une mythologie souvent boudée des auteurs : celle de l’antiquité sumérienne. Rien que ça, c’est déjà une bonne raison de se lancer dans cette lecture. Pourtant plus haut, j’en ai donné quatre de plus.
Un excellent roman pour s’envoler loin, très loin dans le temps et dans l’espace, loin des soucis du quotidien !
[Lire la chronique d'[Espaces Comprises]]

À la veille de ses 16 ans, Séléné Savel voit sa vie changer brutalement de cap. Son père, un universitaire excentrique avec lequel elle vit seule en Bretagne depuis la mystérieuse disparition de sa mère Iris, six ans auparavant, l’envoie à Paris pour y entrer en seconde au prestigieux Lycée Darcourt. Froidement accueillie par sa cousine Alexia qui règne sur l’établissement, pas en phase avec les codes de ce nouvel environnement très snob, la jeune fille désespère. Elle ne trouve un certain réconfort que dans la compagnie de deux garçons très dissemblables : Thomas, un jeune musicien plein d’humour qui n’est manifestement pas insensible à son charme, et surtout Lazlo, bel étudiant trouble et ténébreux, dont elle va devenir passionnément amoureuse. Mais simultanément, Séléné voit son quotidien envahi par des visions étranges, des cauchemars, des événements troublants. Amenée à enquêter sur le mystère de sa mère disparue, la jeune fille va peu à peu découvrir que celle-ci venait d’ailleurs, d’un monde parallèle où une ancienne civilisation mésopotamienne s’est perpétuée, sous l’influence d’une lune intelligente adorée comme une divinité. Les événements dramatiques qui s’enchaînent à la faveur de cette série de découvertes vont bouleverser à tout jamais l’existence de Séléné.

Vampire* Puisque Toxic a déjà été suggéré par Anne Rossi, nous avons demandé à Cécile de nous recommander un quatrième opus :

Vampire malgré lui, une anthologie collective, aux éditions du Petit Caveau

Encore des vampires ? Oui, mais pas n’importe lesquels : des vampires qui n’ont rien demandé et qui auraient bien voulu rester humains, pardi ! Dans cette anthologie, vous trouverez toutes sortes de nouvelles, car les genres et les styles sont très variés. Du steampunk au fantastique horrifique, il y en a pour tous les goûts. Et puis, en plus, il y a un chat-vampire caché dans les nouvelles… rien que pour ça, il faut lire cette anthologie.
Et enfin, l’indice qualité imparable : une des nouvelles a reçu le prix Merlin de cette année… on fonce !

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La sélection d’été d’Alan Spade

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lanuitdestempsLa Nuit des Temps de René Barjavel, aux Presses de la Cité
En général, je ne suis pas trop amateur des histoires d’amour. Pour moi, on est plus dans une histoire d’amour que de SF « pure », mais son intensité dramatique m’a laissé un souvenir impérissable.

Dans le grand silence blanc de l’Antarctique, les membres d’une mission des Expéditions polaires françaises s’activent à prélever des carottes de glace. L’épaisseur de la banquise atteint plus de 1 000 mètres, les couches les plus profondes remontant à 900 000 ans…
C’est alors que l’incroyable intervient : les appareils sondeurs enregistrent un signal provenant du niveau du sol. Il y a un émetteur sous la glace. La nouvelle éclate comme une bombe et les journaux du monde entier rivalisent de gros titres : « Une ville sous la glace », « Un coeur sous la banquise », etc. Que vont découvrir les savants et les techniciens qui, venus du monde entier, forent la glace à la rencontre du mystère ?
Reportage, épopée et chant d’amour passionné, La Nuit des temps est tout cela à la fois.

ÿ ‹DLes Guerriers du Silence de Pierre Bordage, aux éditions L’Atalante
À l’époque où je l’ai lu, je ne connaissais pas Bordage, et je ne m’attendais pas à ce niveau de qualité chez un auteur français. Une surprise extrêmement plaisante, un livre qui s’apparente pour moi à un classique.

Quelque cent mondes composent la Confédération de Naflin, parmi lesquelles la somptueuse et raffinée Syracusa. Or, dans l’ombre de la famille régnante, les mystérieux Scaythes d’Hyponéros, venus d’un monde lointain, doués d’inquiétants pouvoirs psychiques, trament un gigantesque complot dont l’instauration d’une dictature sur la Confédération ne constitue qu’une étape. 
Qui pourrait donc leur faire obstacle ? Les moines guerriers de l’ordre Absourate ? Ou faudrait-il compter avec cet obscur employé d’une compagnie de voyages, qui noie son ennui dans l’alcool sur la planète Deux-Saisons ? Car sa vie bascule le jour où une belle Syracusaine, traquée, passe la porte de son agence…

1306-niourk_orgNiourk de Stefan Wul, aux éditions Castelmore
Une authenticité dans le récit et une « qualité de rêve » qui m’a estomaqué, un récit parfaitement mené de bout en bout.

Les hommes ont régressé à un stade primitif après une catastrophe nucléaire qui a bouleversé la planète. La survie s’est organisée au coeur de tribus. Dans l’une d’elle vit un enfant noir, rejeté par les siens à cause de sa différence. Lorsque l’enfant est condamné à mort par leur chef, il se met alors en route vers Niourk, la ville des dieux, en quête de nourriture. Mais dans cette métropole abandonnée ne subsistent que ruine, radiations et machines étranges…

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La bêta-lecture en questions

D’où vient le terme « bêta-lecture » et que signifie-t-il ? Cette expression reprend le préfixe « bêta », couramment utilisé en informatique pour désigner une version de test d’un concept ou d’un projet (les geeks parmi vous ne s’y seront pas trompés !). La bêta-lecture est donc la lecture d’un texte par un tiers en vue d’aider l’auteur à l’améliorer. Cela peut être un outil précieux pour l’écrivain qui, plongé dans son texte, peinera à prendre du recul à son sujet et aura donc l’usage d’un regard critique extérieur.

Où trouver des bêta-lecteurs?

Il existe des forums dédiés (CoCyclics pour la SFFF et le Co-Lecteurs pour tous les genres, notamment). L’échange de bêta-lecture est leur objectif premier et on trouve toujours des membres plus expérimentés pour nous aiguiller et nous renseigner. Quand on est débutant, cette aide extérieure dans une démarche pas si évidente peut être salvatrice.

Néanmoins, ils ne sont pas les seuls lieux où trouver des gens qui accepteront de vous lire : en règle générale, c’est votre propre carnet d’adresse qui est le meilleur fournisseur de bêta-lecteurs ! Bien sûr, vous pouvez faire appel à votre famille ou à vos amis. Attention, ces deux cercles sont à double tranchant car vos proches peuvent être enclins à la complaisance, or vous avez besoin d’avis objectifs, pas qu’on vous passe la pommade ! Mais vous pouvez aussi trouver des groupes d’écriture dans votre ville, rencontrer des lecteurs intéressés à la bibliothèque ou encore faire appel aux réseaux sociaux en ligne, où groupes et pages dédiés aux écrivains débutants foisonnent.

Il existe également des solutions payantes de coaching littéraire, dont la qualité et le sérieux varient. Si c’est la solution que vous choisissez, prenez garde aux offres malhonnêtes, elles sont nombreuses !

Comment choisir ses bêta-lecteurs ?

Il ne faut pas négliger le choix de ceux qui critiqueront votre texte, et ce, pour bien des raisons. Tout d’abord, les personnes à qui vous confierez votre travail doivent être de confiance : une relation basée sur l’honnêteté est essentielle dans ce type d’échange. Vous ne voulez pas vous faire voler votre texte et vous ne voulez pas non plus recevoir des moqueries acides et condescendantes. Assurez-vous de choisir des personnes avec qui le contact est bon et le dialogue facile.

Ensuite, assurez-vous que ces personnes sont « aptes » à critiquer un texte. Je n’entends pas par là qu’ils soient tous titulaires d’un doctorat en lettres classiques, mais que ces personnes s’intéressent un minimum à la littérature parce qu’elles vont fournir un travail de longue haleine, qu’il ne faut pas qu’elles se lassent en cours de route. Il faut également qu’elles comprennent les rouages d’un texte et ses nécessités pour pouvoir les analyser.

Enfin, leurs goûts en matière de littérature sont importants. Un lecteur qui n’aime pas le genre littéraire auquel appartient votre texte en connaîtra moins bien les codes, les classiques, les références. Quelqu’un qui vous lit sans enthousiasme parce que « ce n’est pas son genre » aura sans doute un avis moins enrichissant que celui d’un lecteur éclairé.

Comment ça se passe ?

Il n’y a pas de recette miracle, tout dépend des attentes de l’auteur et des capacités du bêta-lecteur. Certains écrivains savent précisément ce qu’ils veulent de leurs bêta-lecteurs.

Cécile Ama Courtois demande « surtout des réactions « à chaud » sur l’histoire, le déroulement des évènements, des scènes, etc. Je demande à mes bêta-lecteurs qu’ils écrivent au fur et à mesure ce qu’ils ressentent à la lecture de chaque chapitre : les sentiments que l’intrigue (et la manière dont elle est écrite) leur inspire, leurs questions, les choses qui ne vont pas (qui ne « collent » pas), les incohérences, les émotions mal amenées, mal exprimées… Et j’attends surtout d’eux une grande objectivité et une grande honnêteté. »Tout cela en plus de « quelques corrections de fautes qui m’auraient échappées, de tournures ou d’expressions qui seraient « mal dites », etc. ». En bref, un commentaire détaillé et exhaustif.

D’autres, à l’inverse, laissent la bride sur le cou à leur bêta-lecteurs : à eux de choisir s’ils veulent faire du point par point ou bien un avis général, quelque chose de long ou un résumé succinct. C’est le cas d’Ophélie Bruneau : « Quand je demande une bêta-lecture, je veux « toute remarque permettant d’améliorer le texte ». Ça reste large. Certains vont me renvoyer une appréciation globale, d’autres reprendront point par point, ça dépend des gens. Je prends tous les retours, car tous, même s’ils tiennent en trois phrases, me seront utiles. » Et lorsqu’on lui demande si elle s’attend à des critiques de fond ou de forme, elle répond : « Les deux, mon capitaine. Ça va ensemble, de toute façon. »

Au final, les modalités d’une bêta-lecture sont à définir entre l’auteur et le lecteur. Car si l’auteur a de grosses attentes, il demande aussi un gros travail à son lecteur et celui-ci doit s’y préparer. L’idéal, lorsqu’on demande une bêta-lecture (ou qu’on accepte d’en réaliser une), est donc d’en discuter, afin de savoir exactement ce que l’une et l’autre partie attendent de cette expérience.

Que faire des bêta-lectures ?

Un panel de lecteurs plus ou moins étendu vous a rendu des avis. Maintenant, que devez-vous en faire ? Appliquer à la lettre les suggestions qui s’y trouvent ? Oui, mais si les bêta-lecteurs se contredisent ? Comme pour le point précédent, la manière dont vous réagissez aux critiques de vos lecteurs-test ne dépend que de vous.

« J’examine chaque remarque en partant du principe que si lecteur et auteur divergent, c’est,dans la plupart des cas, le lecteur qui a raison. Avec cette idée en tête, j’essaie d’analyser factuellement chaque remarque, puis d’évaluer la possibilité de corriger et l’ampleur du boulot. La décision se fait ensuite naturellement. Si l’histoire ne fonctionne pas, je change. Si elle fonctionne mais demande des changements mineurs, je les effectue. Si elle fonctionne mais demande de gros changements, je décide en fonction de la quantité de boulot que ça induit »,raconte Fred Vasseur. Un point de vue qui privilégie le lecteur et son analyse, et qui demande une bonne dose de remise en question et l’acceptation d’une intervention dans la conception du texte qui peut être conséquente.

Certains auteurs sont plus possessifs avec leur travail et préfèrent se fier à une méthode plus rationnelle pour les commentaires. Sylvain Desvaux explique que sa sélection est basée sur la redondance des critiques. Selon lui, c’est « arithmétique : si un seul lecteur te fait une remarque sur le fond ou la forme, ses goûts et son éducation sont sans aucun doute impliqués et sa remarque n’est pas forcément pertinente. De même, si 4 lecteurs sur 5 me font la même remarque, je me repenche sur ce point précis, même si tout me paraissait tenir debout. »

D’autres encore choisissent un intermédiaire entre la redondance des critiques et leur propre ressenti. C’est le cas de Cécile Ama Courtois : « Je prends le temps de lire plusieurs fois une critique, à plusieurs heures, voire plusieurs jours d’intervalle. Histoire, d’une part, de ne pas réagir à chaud, de manière impulsive et émotionnelle (ce n’est jamais bon), et également de manière à réfléchir à toutes les « faces » du problème qui m’est posé. J’essaie de toujours garder à l’esprit que si le lecteur n’a pas compris ce que j’ai voulu dire, ou n’a pas ressenti ce que je voulais qu’il ressente, c’est que je l’ai mal exprimé et qu’il me faut donc recommencer. Sinon, comment je fais le tri ? Il y a des choses auxquelles je tiens, que j’ai écrites de telle manière volontairement et que je garde même si plusieurs bêta-lecteurs me l’ont signalé comme faux ou dérangeant. Pour le reste, certaines critiques m’apparaissent évidentes et justifiées. Pour celles-là, je corrige tout de suite. D’autres me laissent perplexes, j’attends alors d’avoir tous les retours pour voir si elle revient plusieurs fois et j’avise. »

Une fois encore, il n’y a pas de constante ou de recette miracle. C’est l’auteur qui reste maître de son texte et qui est le décisionnaire final, mais le respect des bêta-lecteurs s’impose : réfléchir aux critiques qui sont exprimées, même si on n’en tient pas compte, est toujours enrichissant.

Quand envoyer son texte à la bêta-lecture ?

La décision finale est entièrement dépendante du ressenti de l’auteur.La plupart des écrivains choisissent de relire et de corriger eux-mêmes leurs textes, parfois plusieurs fois, avant de les soumettre à un lectorat. Les raisons invoquées sont diverses : Iluinar considère que c’est « la moindre des politesses », tandis que Fishdrake considère que « l’écrivain ne doit pas s’appuyer que sur le bêta-lecteur pour lui signifier ses erreurs, faute de quoi il faudra mettre aussi leur nom sur la couverture. »

À l’inverse, Sylvain Desvaux envoie « toujours des premiers jets pour 2 bonnes raisons : je sais ainsi que le texte n’est pas dans sa version finale et que les critiques sont justifiées ».

À qui profite le crime ?

Il est évident que l’auteur et son texte profitent de ces bêta-lectures. Mais sont-ils les seuls ? Apparemment, non.

Pour Maureen Konrad, « lorsqu’on lit un livre déjà édité et publié, il est difficile de voir les modifications,[…]on ne voit du livre que sa façade finale tandis qu’en tant que bêta-lecteur, on peut également l’accompagner dans ses idées, son développement, bref, tout ce qui touche au monde auquel il donne vie dans nos esprits ! » Une manière, pour un lecteur habitué au produit fini, d’avoir « un pied dans le réel et un autre dans l’imaginaire ».

Mais pour ceux qui bêta-lisent leurs comparses, l’expérience s’avère probante. C’est ce qu’explique Earane : « bien souvent, lorsqu’on retrouve certains de ses propres tics chez les autres, ça fait écho et je crois que l’on intègre davantage la remarque pour soi aussi. C’est aussi un grand avantage de la bêta-lecture. Voir chez les autres ses défauts et essayer de les corriger du même fait. »

Un enrichissement qui, d’après David J. Collins, est assez similaire à l’expérience de tout auteur lisant un livre écrit par quelqu’un d’autre.« Peut-être que je suis un lecteur-test lorsque j’achète pour la première fois le livre d’un auteur en particulier[…]. Autant Stephen King est devenu comme un mentor (faut garder le secret, il ne le sait pas !), autant je sais désormais que je ne veux faire ni du Dan Brown ni du Levy ou du Musso. ».

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Entre parenthèses…

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Après le tiret, les guillemets et l’usage de l’italique, nous passons aux parenthèses ! Bon, vous me direz, les parenthèses, vous connaissez. Rien de compliqué là-dedans, une fois qu’on a compris que chaque parenthèse ouverte se ferme. Et voilà, le cours est fini, à la semaine prochaine !!!

Bon, ok…

Un peu de typographie :

Alors les parenthèses, en effet, ce n’est pas ce qu’il y a de plus compliqué au niveau typographie. Pas d’espaces à l’intérieur des parenthèses, espace justifiante à l’extérieur.

Le blabla^(pas d’espace autour du blabla que vous voulez mettre entre parenthèses)^et la suite du blabla. Évidemment, dans le cas où votre parenthèse fermante est suivie d’une virgule, d’un point ou de points de suspension, il n’y a pas d’espace : (un truc entre parenthèses), et la suite de votre phrase.

Maintenant, la partie intéressante, à savoir la ponctuation de votre blabla entre parenthèses. Si vous avez une phrase complète entre parenthèses, elle va commencer par une majuscule et se terminer par un signe de ponctuation (point, point d’exclamation, d’interrogation, points de suspension). Si la phrase n’est pas complète, pas de majuscule au début, et pas de ponctuation à la fin.

Ceci est une phrase (vous vous en doutez un peu) qui prouve que je suis toujours aussi nulle pour les exemples (Mais qu’on ne se moque pas, ok ? J’essaie de faire des efforts !).

Le signe de ponctuation est « chassé » à la fin de la parenthèse.

On peut imbriquer des parenthèses (je le fais souvent dans mes emails (j’ai tendance à aimer les parenthèses)), mais évitez quand même de le faire, ce n’est pas ce qu’il y a de plus gracieux dans un texte littéraire.

Utilisation des parenthèses :

L’explication

La parenthèse sert ici à expliquer un propos, ou donner des exemples :

Les héritiers (enfants, frères et sœurs) ont droit à une partie du patrimoine.

L’isolation

Ici, on va introduire une précision, indispensable ou non, que l’on isole pour ne pas briser le rythme de la phrase :

—   Prends une carte en fermant les yeux.
—   Comme ceci (elle ferme les yeux et tend la main vers les cartes) ?

Le commentaire

Assez clairement, les parenthèses sont ici utilisées pour préciser la pensée du narrateur :

Les remarques négatives (et assez injustes) sur sa manière de s’habiller ont causé beaucoup de peine à Alexandra.

Vous pouvez aussi utiliser les parenthèses pour indiquer une alternative, ou la coexistence de deux formes entre lesquelles vous ne choisissez pas vraiment :

Les remarques négatives (ou objectives) sur sa manière de s’habiller ont causé beaucoup de peine à Alexandra (ou alors elle faisait très bien semblant).

Les confidences au lecteur

Le narrateur peut utiliser les parenthèses comme aparté, pour s’adresser à son lecteur :

— Et tu es encore rentré au milieu de la nuit ! Et comme d’habitude, tu as jeté tes vêtements partout dans la pièce sans même les plier et les mettre sur la chaise !
(Décidément, elle ne me laisserait jamais en paix… Elle se prenait vraiment pour ma mère. Ou ma femme. Et cela me déplaisait au plus haut point.)

Parenthèse dans le discours

—   Et là, j’étais persuadée (vous savez à quel point je suis paranoïaque) qu’il me suivait et qu’il allait m’attaquer sauvagement.

Parenthèse dans une pièce de théâtre

Je ne sais plus ce que je fais ! (Il se met à genoux et commence à se balancer d’avant en arrière.) Depuis deux jours, j’ai l’impression que je deviens fou, que je perds la tête. (Il enserre ses tempes de ses mains.)

Il est d’usage de mettre le texte entre parenthèses en italique.

Indication d’une traduction

—   Sie sprechen Deutsch ? (Vous parlez allemand ?) demanda-t-elle.
—   Ja, sicher. Aber wenn es möglich wäre, möchte ich mit Ihnen in Französich sprechen. (Oui, bien sûr. Mais si c’est possible, je préférerais vous parler en français.)

Vous noterez d’ailleurs que les mots étrangers sont en italique.

Il y a évidemment de nombreux autres usages, mais ils ne sont pas pertinents dans le cadre de la rédaction d’un récit, et s’utilisent plus fréquemment dans des ouvrages de référence, des bibliographies, des ouvrages techniques, etc.

Et voilà ! Si vous avez des questions, n’hésitez surtout pas !

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La sélection de Jean-Christophe Heckers

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rainbow warriorsRainbow Warriors d’Ayerdhal, aux Éditions Au Diable Vauvert
Roman encore frais et d’actualité en cette année de virulents débats autour du mariage pour tous. Le point de départ est loufoque : des personnalités influentes (qu’on reconnaît facilement) ont pour projet de renverser une dictature africaine à l’aide d’une armée de mercenaires LGBT. Mais évidemment rien n’est ni simple ni évident dans tout ça. Un roman drôle et grave mené tambour battant et sans temps morts. Se déguste sans modération.

Mis à la retraite sur requête du bureau ovale, le général de division Geoff Tyler se voit proposé par l’ancien secrétaire général des Nations Unies de reprendre du collier à la tête d’une armée privée financée par des célébrités de toutes obédiences. Son objectif : renverser le dictateur d’un État africain, soutenir le gouvernement transitoire le temps de la rédaction d’une constitution démocratique, et permettre la tenue d’élections en bonne et due forme.
Ses moyens : à lui de les définir, l’argent n’est pas un problème. Son effectif : Un encadrement d’une centaine de professionnels et 10 000 soldats dont il faut parfaire la formation.
Jusqu’ici tout va bien. Il y a toutefois un détail. Cette armée est presque exclusivement constituée de LGBT. Lesbian, Gay, Bi, Trans.
Alors que le mariage et l’homoparentalité pour tous font encore débat, Ayerdhal nous pousse au-delà de nos limites et nous plonge avec humour au cœur de thèmes férocement actuels : l’ingérence militaire sous prétexte humanitaire, la solidarité à l’échelle mondiale d’un groupe stigmatisé et persécuté, la défense sans concession des Droits de l’Homme… Cette fiction plus vraie que nature interroge avec une impertinence jubilatoire. Et si l’engagement d’individus non directement concernés, aux côtés de populations persécutées, pouvait modifier le destin du monde ?

devenustupideComment je suis devenu stupide de Martin Page, aux éditions Le Dilettante
Le roman a une dizaine d’années, mais il est impératif de le lire : drôle et amer, ce parcours au fil d’une quête existentielle ne manque pas de piquant, et donne à réfléchir.

Tout est affaire de méthode. Même la course au néant. « Surtout la course au néant », rétorque le narrateur de Martin Page. Birman de souche, sorbonnard de maintien, faible mais obstiné, il a décidé de s’offrir en proie au rien, de s’annihiler avec rigueur. Et dans son cas, néant = sottise. il lui faudra donc « couvrir son cerveau du suaire de la stupidité ». Mais d’où plonger pour ce grand bain de vide, d’où s’autopropulser au cœur de l’absence ? Première procédure envisagée : l’éthylisme. Il y a en effet dans l’alcool des potentialités à l’affaissement cérébral, des richesses en matière de dissolution mentale qu’il serait vain de nier et bête de négliger. L’ingurgitation méthodique de breuvages fatals est donc envisagée, ce sous l’œil d’un spécialiste. Las ! la mousse d’une simple bière n’a pas effleuré la lèvre de notre candidat à l’auto-dissolution que le voilà comateusement jeté à terre. Reste l’acte ultime, qui réclame une volonté de boxeur et une discipline de samouraï : la crétinisation. La tâche s’annonce complexe, l’effort énorme. Il lui faut, pour plier ses bagages mentaux, abolir sa bibliothèque, effacer sa mémoire, dissoudre son q. i. Il s’aide pour la chose d’une substance idoine censée le bêtifier sans faille. La chose prend tournure. Mais c’est sans compter avec de redoutables anges gardiens qui s’en viennent glisser sous son œil vide un choix de la correspondance de Flaubert. Patatras ! Un éclair d’intérêt se remet à brasiller dans cette prunelle promise à l’atonie. Son retour au monde des mammifères cérébrés se fera grâce à une espastroulante séance d’exorcisme. Est con qui peut. N’est pas crétin qui veut (vieux proverbe birman).

SangdepierreSang de Pierre d’Elisabeth Vonarburg, aux éditions Alire
Le dernier recueil en date (à ma connaissance) d’une très grande dame de la SF (Québéquoise d’adoption) est tout sauf facile et gratuit. Lecture exigeante, pour des textes profondément humains au sein d’un avenir plutôt déliquescent. Et quel style…

Le ciel gris moutonnant de nuages, la mer maussade et houleuse, Manuelle étendue inconsciente et pâle sur la petite plage près du quai, dégoulinante, son ventre nu et proéminent bien en évidence, et les trois sirènes auprès d’elle, avec celle qui me fait face, Tiliss, le torse illuminé de signaux verdâtres par le message bioluminescent que j’étais bien incapable alors de déchiffrer, mais ce n’était pas nécessaire. Je me suis agenouillé près de Manuelle, et dès que je l’ai touchée j’ai su ce qu’elle était…
Résultat d’un ancien projet d’hybridation, les sirènes représentaient, pour Arkon Corless, l’avenir de l’humanité, décimée par une terrible pandémie. C’est ce qu’avait toujours cru Manuelle, du moins jusqu’à ce que surgisse Spark…
Ils ont tous quinze, trente ou quarante-cinq cycles. Comme Ouré, diOuré et triOuré. Sauf Hilsh, qui a vingt cycles et aucun clone et l’impression d’être un corps étranger sur ce Vaisseau parti il y a vingt-trois générations.
La capsule de sauvetage de Jacob a abordé une planète où il pourra survivre en attendant les secours. Or, deux jours après son arrivée, des rêves étranges envahissent son esprit, des rêves qui ne sont pas à lui… ou le sont-ils ?
Six nouvelles d’une rare intensité, tant littéraire que thématique, six immersions singulières – à fleur d’émotions – dans l’espace-temps infiniment flexible d’Élisabeth Vonarburg.

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